Une fenêtre de tir une fois par an pour résilier son assurance Emprunteur

Défendue par certains députés, la résiliation à tout moment de l’assurance emprunteur a été rejetée le 21 octobre lors d’une réunion commune entre les assemblées. Statu quo donc pour les personnes ayant contracté un crédit immobilier, obligées de terminer à la date anniversaire. explications.

Résiliation de l’assurance emprunteur seulement à échéance annuelle

L’idée de pouvoir résilier à tout moment son contrat d’assurance emprunteur a fait long feu, étouffée dans l’œuf lors des va-et-vient entre les législatures. Cette mesure, initialement favorable aux consommateurs, était soutenue par certains parlementaires et souhaitée par l’association UFC-Que Choisir. Elle avait même trouvé un écho chez les acteurs, banques et assureurs, exclus du marché.

Car le gâteau de l’assurance emprunteur fait des envieux : 6 840 millions en 2019. Pourtant, ce marché est monopolisé par les principaux groupes de bancassurance à hauteur de 87,5 %. Si l’assurance-crédit n’est pas obligatoire en théorie, elle l’est en réalité. Comment ou quoi ? Car les organismes qui prêtent de l’argent le temps d’un crédit immobilier l’exigent simplement pour finaliser leur offre de prêt.

Pour rappel, l’assurance débiteur est une assurance décès et invalidité qui garantit une couverture partielle ou totale du crédit immobilier lorsque le débiteur ne peut plus payer et faire face à ses échéances, pour cause d’invalidité, de perte d’autonomie ou de décès. Dès lors, l’assurance emprunteur permet à la banque prêteuse de se couvrir, mais aussi à l’assuré de se protéger ainsi que ses proches qui n’ont pas à supporter cette charge en cas de problème.

Et qui fournit cette assurance emprunteur ? Les banques justement ! Ils profitent de la diffusion de leur offre de crédit pour joindre leur contrat logement, généralement avec quelques avantages pour convaincre les clients. D’où le monopole de ces grands groupes de bancassurance qui captent près de 50 % des cotisations selon l’UFC-Que Choisir, l’association qui parle de « rente viagère en situation ».

La situation de rente du juteux marché de l’assurance emprunteur

L’Autorité de résolution et de contrôle prudentiel (ACPR) estime le montant collecté par les banques à partir de 100 euros de cotisations à 68 euros, le reste étant reversé aux assurés. Il est aisé de comprendre pourquoi les établissements bancaires font tout pour ralentir voire geler le débat, alors que la situation des loyers porte ses fruits en même temps que les recettes alternatives s’épuisent (taux d’intérêt bas, restrictions à une réglementation plus stricte) .

Un travail qui a fonctionné avec l’annulation de la résiliation de l’assurance emprunteur à tout moment lors de la réunion de la commission paritaire. Il faut dire que la recherche d’un compromis sur le sujet n’était pas centrale, puisque les discussions pointaient vers une convergence sur un texte juridique plus large sur l’Accélération et la Simplification de l’Action Publique (ASAP).

Le Gouvernement, par la voix de sa représentante, la ministre déléguée à l’Industrie, Agnès Pannier-Runacher, avait également déclaré son opposition, arguant que « les banques vont augmenter le coût des assurances, la perversité de ce dispositif est peut-être que les plus vulnérables paient plus . » « . Argument qui est déjà mis en avant… par les banques qui affirment qu’une telle mesure signifierait la fin des contrats d’habitat collectif (mutualisation) au profit des contrats individuels, ce qui se traduirait à terme par une augmentation des cotisations pour les plus fragiles profils ou précaires.

De la délégation d’assurance à la résiliation à date anniversaire

Cependant, même si cette étape est sautée, l’échelle réglementaire dessert régulièrement un nouvel étage. Tout d’abord, la loi Murcef de 2001 a interdit la vente liée d’assurance crédit et emprunteur, ouvrant la voie à la délégation d’assurance. La loi Lagarde de 2010 oblige les établissements de crédit à accepter une assurance emprunteur autre que le contrat habitation au moment de la souscription, pour autant que les garanties émises soient au moins équivalentes à leur offre.

Conséquence positive : les groupes de bancassurance ont amélioré leur offre pour éviter la concurrence. Bilan négatif : les délais ont continué d’inhiber la concurrence. Faute de temps suffisant pour comparer les solutions du marché, les procédures ont été compromises, d’autant plus que la résiliation du contrat en cours de contrat n’était pas possible (sauf option prévue au contrat).

Puis vint la loi Hamon en 2014 qui permettait à l’assuré de changer d’assurance emprunteur sans frais pendant la première année du contrat. Une mesure complexe à opérer, dans le sens où les assureurs modifient périodiquement les contrats chaque année. Dès lors, l’attractivité d’un contrat d’un an n’est plus forcément attractive pour l’année suivante.

Enfin, l’Amendement Bourquin, voté en 2017 et entré en vigueur le 1er janvier 2018, offre aux emprunteurs la possibilité de résilier leur assurance-crédit chaque année (à la date anniversaire du contrat ou à la date d’expiration notifiée dans le contrat). Cette démarche est gratuite et tout refus de la banque doit être motivé. Attention, la nouvelle assurance emprunteur doit toujours présenter des garanties au moins équivalentes à l’assurance de l’ancien emprunteur.

Vers une obligation d’informations renforcée pour les assureurs ?

Avec le refus d’un licenciement à tout moment, c’est donc le statu quo. La seule avance renvoie à l’impératif pour les banques d’informer leurs clients « sur papier ou sur tout autre support durable » de la date d’expiration, des modalités et des formalités à suivre pour résilier leur assurance débiteur. Une obligation qui incomberait aux assureurs et non aux banques.

Selon Les Echos, un rapport préliminaire de la Commission consultative du secteur financier (CCSF) considère toutefois que l’échelle réglementaire a permis aux consommateurs d’être « les principaux bénéficiaires de toutes les réformes, notamment avec des prix réduits et des garanties renforcées » (prix aurait diminué jusqu’à 40 %).

Mais pour Alain Bazot, président de l’UFC-Que Choisir, la déception est forte : « nous plaçons les consommateurs dans une obligation de vigilance alors que nous avons déjà recensé de nombreuses pratiques dilatoires des établissements pour refuser, juger hors délai, voire ne pas répondre aux demandes de l’assuré. Et rappelez-vous que « pour les premiers acquéreurs, un an de plus, c’est environ 800 € de perdu. Pour les plus de 65 ans, il va de 3 à 400 euros ».

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