Livrets d’épargne réglementés : vers une année record

Incertitude rime avec prudence. Les épargnants ne dérogent pas à la règle pendant cette crise sanitaire marquée par le confinement. Entre baisse de la consommation, report des investissements et aides publiques obligatoires : le taux d’épargne explose tout comme l’encours du Livret A et du LDDS.

De l’épargne forcée à l’épargne de précaution

2,5 Md€, c’est la collecte nette du Livret A et du Livret de développement durable et solidaire (LDDS) en juillet 2020. Le solde total des deux livrets d’épargne réglementés atteint désormais 440 Md€, dont 320,8 Md€ pour l’épargne du Livret A. Depuis la début d’année, la collecte nette s’élève à 28 milliards d’euros malgré un gel des taux d’intérêt en février 2021.

Ces chiffres ne sont pas surprenants compte tenu du contexte d’incertitude qui règne dans le monde en raison de la pandémie et de ses conséquences. Fervents adeptes de la prudence, les Français apprécient particulièrement investir leur épargne de précaution dans des produits sûrs pour leur argent et accessibles à tout moment.

Ils thésaurisent même en laissant leur épargne inutilisée dans leurs comptes bancaires, qui cependant ne rapportent rien. Autre produit de prédilection : l’assurance-vie en fonds euros est boudée depuis le confinement, même si la tendance semble s’inverser depuis l’été. Bref, toutes les planètes sont alignées pour gonfler l’encours des livrets d’épargne réglementés malgré la faible rémunération.

Il faut dire que le Livret A et le LDDS sont des véhicules fiscaux avantageux. En effet, les gains sont exonérés d’impôt sur le revenu et de cotisations sociales. Les dépôts et les retraits sont gratuits. Les plafonds ont été revus à la hausse à partir de 2012-2013, laissant plus de marge de manœuvre. Attention cependant, car une personne ne peut avoir qu’un seul Livret A et qu’un seul LDDS. Par conséquent, les doublons sont interdits.

Que faire du magot des Français ?

Ce constat est corrélé aux chiffres de l’INSEE indiquant que le taux d’épargne des ménages s’élevait à 27,4% au deuxième trimestre 2020. Une hausse significative puisque ce taux était de 19,7% au premier trimestre et de 15,1% au quatrième trimestre 2019. L’explication vient d’une augmentation de l’épargne ajoutée aux investissements à demi-personnel. Les Français ont reporté leurs achats, ce qui a provoqué une baisse de la consommation.

L’argent récupéré, notamment grâce à l’aide de l’État instaurée à la suite de la crise sanitaire et qui a été classée en cagnotte, a été déposé, en grande partie, sur des livrets d’épargne réglementés comme mentionné ci-dessus. Depuis mars, l’Insee évalue cet effort d’économie à 100 000 millions d’euros. Et parmi les pays de l’OCDE, les Français sont parmi ceux dont le revenu disponible brut a le moins diminué : -0,3 % au premier trimestre, -2,4 % au deuxième trimestre.

Cette baisse en trois mois est pourtant la plus forte depuis 1949. Ainsi, la masse salariale a baissé de 10 %, après une première baisse entre janvier et mars de 2,4 %. Même signal du côté des revenus du patrimoine : -2,9% (T1 2020) après -3,7% (T2 2020). Les administrations publiques à travers les aides exceptionnelles de solidarité (pour activité partielle, chômage, absence pour garde d’enfant) ont contribué à une hausse de 7,9% des aides sociales (+2,3% déjà au 1T 2020).

L’INSEE montre logiquement que la baisse des revenus du travail entraîne une baisse des impôts sur le revenu et sur la fortune. Enfin, le pouvoir d’achat a baissé de 2,1% dans un contexte de baisse des prix à la consommation (-0,2% au T2 2020). Une consommation qui s’est vraiment arrêtée avec le confinement : -11,5% au T2 2020, -5,8% au T1 2020. D’où, encore une fois, l’encours des comptes d’épargne A et LDDS qui partent en flèche.

La question qui se pose au gouvernement : comment orienter cette masse d’argent pour relancer l’économie une fois la pandémie maîtrisée ? Un des angles d’attaque serait de surfer sur le fait que de nombreux Français aspirent à donner du sens à leur épargne. Lutte contre le réchauffement climatique ou le chômage, soutien aux entreprises vertueuses et à l’agriculture biologique : autant de secteurs qui peuvent inciter les ménages à investir dans l’activité économique, en faisant fructifier leur argent au lieu de le laisser dormir.

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