Le processus de médiateur bancaire sous le feu des critiques
La médiation commerciale est utilisée pour gérer les litiges avec les consommateurs. Mais, entre le manquement aux normes réglementaires et la remise en cause de la désignation des médiateurs bancaires, l’utilité de cette instance interroge les parlementaires et les associations de défense des consommateurs. Allumer.
Beaucoup trop de demandes irrecevables
La médiation bancaire a été introduite pour résoudre les litiges entre les usagers des banques et les banques. Le médiateur intervient pour trouver une solution au problème face à un éventuel procès. L’objectif est de renouer un dialogue rompu entre les deux parties, d’établir un terrain d’entente et de résoudre les différends à l’amiable. Les banques jouent-elles le jeu ?
Pas forcément selon la Commission consultative du secteur financier (CCSF), instance composée de représentants des entités financières, des syndicats, des clients et des parlementaires. 84% des demandes de médiation bancaire des entreprises sont considérées comme irrecevables. Ce chiffre est bien plus élevé que pour les autres catégories de médiation : 51 % pour les médiations publiques, 62 % pour les médiations des organisations professionnelles.
Des données qui ont touché l’oreille du ministre de l’Economie. En attendant la publication du rapport de la mission parlementaire du 31 juillet, Bruno Lemaire indique dans sa lettre de mission que « la procédure telle qu’elle a été appliquée a posé des difficultés qui ont pesé sur son efficacité ».
L’un des dysfonctionnements est le mode de désignation des médiateurs bancaires. Alors que les compagnies d’assurance acceptent de n’avoir qu’une seule médiation, les banques ont préféré choisir des médiateurs d’entreprise. Résultats : Les médiateurs sont sélectionnés par les banques contre lesquelles les litiges sont déposés. Ils sont également payés et refinancés par leurs banques. Ce qui alimente le conflit d’intérêt et pèse sur le taux très élevé d’irrecevabilité des saisines.
Réorganiser les délais de procédure de saisine du médiateur
Parmi les causes d’irrecevabilité des saisines de médiation bancaire : le terme légal de la procédure. Le CCSF incite à « limiter les déplacements du consommateur à deux mois avant toute saisine du médiateur ». Parce que ? Parce que les entreprises font délibérément traîner les choses en introduisant deux niveaux de plaintes. Cependant, un litige recevable nécessite que le consommateur ait une réponse définitive de sa banque.
Cette réponse définitive n’intervient donc qu’après deux réclamations, une pratique qui allonge inévitablement les délais et rend irrecevables des saisines pourtant légitimes. De là à dire que le médiateur désigné par la banque elle-même est de mèche, il n’y a qu’un pas que l’UFC Que-Choisir n’hésite pas à sauter, dénonçant « le zèle excessif de certains médiateurs qui n’ont rien trouvé de mieux que d’expédier systématiquement demandes d’autorisation à la banque avant l’examen de vos dossiers.
Autre motif d’irrecevabilité : l’incompétence. Là encore, le CCSF souhaite supprimer les clauses générales d’exclusion pour éviter que les médiateurs d’entreprise ne se déclarent incompétents. Comment ou quoi ? Report du litige en « politique générale » ou en « politique commerciale ».
Le CCSF pourra-t-il trancher au 31 juillet ?
L’UFC-Que Choisir soulève également des questions d’infractions réglementaires en matière de remboursement de la fraude à la carte bancaire sur Internet. Sur ce point, l’association a saisi le gouverneur de la Banque de France au vu de l’ampleur des manquements. Celles-ci se traduisent par des refus de remboursement injustifiés ou des délais d’indemnisation trop longs. Or, c’est justement le rôle du médiateur bancaire de rappeler à l’ordre les professionnels coupables.
Face à ces nombreuses carences, l’UFC-Que Choisir délivre un constat de défaillance « de la banque de médiation des entreprises [incapable d’assurer] sa mission d’arbitre impartial des litiges entre consommateurs et professionnels. L’association préconise une réforme, avec « la création d’un défenseur public véritablement indépendant et efficace de la banque et de l’assurance, comme le défenseur national de l’énergie, dont le consommateur devrait pouvoir bénéficier dès la première réponse du professionnel ».
Malgré les discussions en cours, le CCSF n’a pas réussi à se mettre d’accord pour réduire le nombre de médiateurs, ni même les réunir pour réduire les différences de traitement entre les organisations. Un autre échec est l’absence d’ouverture du processus de nomination des médiateurs indépendants.
Au nom de la Fédération bancaire française (FBF), nous saluons « les propositions constructives et consensuelles qui ont été élaborées ». L’organisation représentative considère que « les travaux n’ont pas pu produire des analyses factuelles et tangibles qui pourraient démontrer la valeur ajoutée attendue et justifier la nécessité de modifier les éléments en question ». La voie est donc étroite pour un rapprochement entre les positions de toutes les parties d’ici le 31 juillet.